La recherche de pratiques vertueuses pour une production et une transformation d’aliments de qualité, se fait souvent en ordre dispersé. Pourtant, de nombreuses pistes convergent souvent dans l’intérêt de tous, tout au long de la chaîne, du producteur au consommateur. L’exemple des « bandes enherbées » entre arbres fruitiers est emblématique de ce qu’apporte l’approche systémique de l’écotrophologie. Reste à décloisonner les labos, les esprits, les spécialités, pour que chaque acteur travaille sur des objectifs partagés, pour le bien commun.
D’un côté en amont, l’agronome a démontré les avantages maintenir de l’herbe entre rangs de pommiers : favoriser la vie dans le sol, la biodiversité, la rétention d’eau, la protection du sol contre l’érosion, etc. Cette technique, héritée des prés-vergers traditionnels, fait partie intégrante d’un ensemble de pratiques constitutives de l’agroécologie.
A l’autre bout de la chaîne, en aval, le spécialiste des mycotoxines a prouvé l’intérêt, pour une pomme tombée au sol, de reposer sur de l’herbe plutôt que sur la terre nue (moins de risque de contamination par des maladies « telluriques »). La récolte de pommes au sol est courante pour les fruits destinés à être transformés en jus, dans lesquels les concentrations de toxines atteignent alors parfois des niveaux inquiétants.
Entre les deux extrémités, l’hydrologue atteste que les bandes enherbées contribuent grandement à la rétention des nitrates et autres polluants diffus, en empêchant leur ruissellement vers les cours d’eau, ou leur lessivage jusque dans les nappes phréatiques.
Le généticien, enfin, sélectionneur de variétés adaptées, proposera des cultivars de pommiers particulièrement adaptés et compatibles avec la présence d’herbe en leur pied… Chacun est gagnant, sur toute la ligne !
Objectivement, cette pratique simple et peu contraignante met tout le monde d’accord, tant elle semble vertueuse à tous les niveaux. Combien de temps a-t-il fallu aux uns et aux autres pour convenir de ses multiples avantages, et ainsi accélérer sa vulgarisation et une plus large application ? De nombreuses filières sont concernées et gagneraient à une approche globale des pratiques selon les objectifs : l’innocuité de nos aliments en général, leur bilan énergétique (et carbone), la tendreté de la viande, la composition du lait, la qualité nutritionnelle des céréales, etc.
Plus que jamais, il est temps de décloisonner les filières tout au long de leurs chaînes de valeur, afin que que chacun ait connaissance de la problématique des autres « compar-timents », et prenne conscience de l’objective convergence d’intérêts. Pour ce qui concerne l’herbe au pied des pommiers, mais aussi une infinité d’autres techniques profitables à l’ensemble des acteurs. Pour le plus grand bien du plus grand nombre…